Projets étudiants

Camille Dionne

«La mémoire ne retient pas tout. Elle emprisonne des moments, elle reconnaît sans nuance, de manière inégale et très subjectivement. Le souvenir et particulièrement celui qui est inscrit par le sens, renaît presque toujours appauvri, partiel. Ces images mentales qui apparaissent dans la conscience sans suite logique, d’une manière presque arbitraire, sont appelées à réapparaître par la coïncidence d’une sensation du présent à cette même sensation provenant du passé. Ce qui nous touche dans certains souvenirs c’est leur caractère principal: la force d’une émotion, un détail qui nous était alors inconnu ou encore le hasard d’une situation qui aura généré du sens. Ce sont ces types de revivance du souvenir qui alimentent mon travail de création en suggérant un temps éprouvé plutôt que pensé. 

La peinture me permet de revisiter ces souvenirs que je tente de rendre tangibles sous la forme de tableaux. Véhicules de l’affect, ces tableaux me permettent de revivre certaines parcelles de mon passé, autrement. Ce sont ces images emprisonnées par la mémoire qui fournissent à l’œuvre des particularités de sa composition qui en affecteront le récit. 

Mon projet de maîtrise rassemble ces tableaux de lieux insolites qui contiennent des éléments invisibles qui ne relèvent pas seulement de l’œil, mais de l’esprit.» – Camille Dionne

 

Valérie Arsenault

«Ma pratique se veut avant tout contemplative d’une certaine manière d’être face aux choses et à l’espace. Elle trouve source, entre autres, dans une fascination pour ce qui se tient à la limite du langage. Elle est motivée par cette sensation d’exclusion, d’inappropriabilité des choses; par le désir de faire l’expérience de cet écart à travers des objets. Travaillant principalement avec le carton, ma production est basée sur une économie de moyens et marquée par un certain hasard découlant du matériau lui-même. L’accumulation d’un même geste répété veillant à recouvrir/parcourir la surface de ses objets donne lieu à une certaine sensation d’épaississement. Ainsi, par une série d’additions et soustractions successives, je souhaite parvenir au plus près du centre des choses; ce point par lequel un objet s’autonomise. Ce qui en résulte atteste d’une approche directe, sensuelle et expressive.» – Valérie Arsenault

 

Annick Larouche

Annick Larouche, I once was an ornithologist, 2023, Gouache sur papier
marouflé sur panneau de bois, 10 x 10 cm.

«Ma recherche se veut une réflexion, dans une approche narrative, symbolique et esthétique, au cœur des tensions et des dialogues entre la représentation de la figure animale et celle de contextes dits domestiques. J’oppose et confonds ces deux univers afin d’évaluer ou de réévaluer notre relation complexe à l’Animal et, par la même occasion, sonder notre rapport au monde, qui est, pour moi, indissociable. À l’aide de diverses stratégies sémantiques ou formelles, je décale l’objet ou l’image de sa réalité en additionnant de nouvelles couches de sens, ce qui donne un statut fluide et une symbolique insaisissable à l’œuvre. Cet ensemble hétéroclite nourrit par les relations fortuites qui y émergent, engendre un système alternatif où l’animal rencontre l’environnement anthropologique de la maison.» – Annick Larouche

 

Édouard Reny Coulombe

«Pour ma maîtrise, je me penche sur la question de l’absurdité de l’art et la vie. Plus précisément sur l’habitation et ses aspects: usuel, relationnel, ludique et romantique. Le point initial est à la fois, le fantasmagorique enfantin et d’un vouloir d’agrémenter l’expérience commune telle un hôte. Les deux viennent s’animer au travers de la rencontre pour se construire un monde sous la forme d’installations éphémères. Dans un sens, je fais du home staging pour arriver à une expérience d’un chez-soi. Soit, rendre l’inutile à l’agréable. Bref, je construis des cabanes pour assouvir mes obsessions utilitaires dans le but d’y présenter des soirées Tupperwear avec un accent de soupers presque parfaits.» – Édouard Reny Coulombe

  • Fin d’études: 2023
  • Directeur de recherche: Georges Azzaria

 

Julia Duranleau

«Marquant d’abord ma recherche à la maîtrise autant au niveau théorique que psychique, la citation de Rimbaud Je est un autre devient ensuite le nom d’un corpus d’oeuvres dans lequel je tente d’explorer le principe d’auto-fiction en vidéo. De la pratique intimiste en vidéo à la réalisation d’un projet filmique collaboratif, mes projets sont le résultat de rencontres, autant avec le Soi qu’avec le Autre, vécues à travers le processus filmique. Situé à la frontière du documentaire et de la fiction, mon travail se base sur une méthode d’auto-filmage obsessif me permettant d’aborder le monde et de provoquer des situations sujettes à la métamorphose fictive. Mon projet de long-métrage The Forget Show, tourné lors d’une résidence artistique au Domaine Forget en mai 2022, s’annonce comme le noyau du corpus Je est un autre. Ce film, devenant le principal témoignage d’allers-retours parcourus entre le réel et la fiction dans l’espace de la dernière année, sera projeté lors d’un événement public qui rassemblera les acteurs et actrices improvisé.e.s ayant participé.e.s à cette aventure.» – Julia Duranleau

 

Julie Desrosiers

«Conversations matérielles – récits liminaux questionne les relations entre humain et non humain, à travers une recherche sur l’intériorité de l’objet, son agentivité et son langage. Dans des petits chantiers poreux, des natures mortes et des tableaux vivants, les matières brutes, ou plus domestiquées, agiront les unes sur les autres pour former et déformer des récits, suggérant leur propre dimension du vivant.

Des assemblages d’éléments naturels, artificiels, bricolés ou fantaisistes, produiront des contextes de rencontres pour explorer les «entre deux». Le corps humain ou le corps objet, le corps réel ou artificiel, placé au cœur de ces agencements, fera apparaître la liminalité, ce «corps» qui contient l’état d’avant et celui d’après. Entre vivant et non vivant, humain et non humain, réalité et fiction, corps et esprit, animé et inanimé… apparaissent des images d’incarnation, d’hybridité et de métamorphose. Je cherche à toucher au sentiment d’étrangeté et de trouble qui éveille la curiosité, tout en proposant l’écoute et l’ouverture à différents langages non humains, menant à l’empathie face à la matière.

Ces réflexions sont intimement liées à leur médium particulier: la marionnette contemporaine, qui côtoie les arts visuels, différentes disciplines et quelques concepts qui la relient à des mécaniques intimes ou plus vastes, à l’écologie et au nouveau matérialisme.» – Julie Desrosiers

  • Fin d’études: 2023
  • Directeur de recherche: Georges Azzaria
  • Instagram: @ju.desrosiers

 

Valérie Turcotte

L’artiste s’intéresse au banal et à l’inutile auxquels elle souhaite redonner une place plus près de l’extraordinaire au quotidien. Elle s’attarde à des moments éphémères, fragiles, fuyants, touchant sa sensibilité d’une manière proche de la poésie; leur accorde temps et attention par le travail artistique ainsi que par une tentative personnelle d’ouverture au moment présent permettant davantage de ces rencontres sensibles. Ces moments sont transformés par la création, bien qu’il en subsiste suffisamment de traces dans les propositions de l’artiste pour que le regardeur les appréhende, soit amené à les considérer différemment et, possiblement, à ouvrir davantage sa sensibilité au monde en quête de ses propres moments sensibles.

La recherche de l’artiste à la maîtrise se décline donc en diverses expérimentations et propositions liées à divers moments rencontrés dans son quotidien et ayant frôlé sa sensibilité; le tout formant un corpus d’œuvre plus ou moins vaste. – Valérie Turcotte

 

Mathilde Demoli

«L’histoire de ma recherche débute avec une fascination pour le vivant, peut-être plus particulièrement pour l’animal et avec la rencontre d’une technique: la taxidermie.

J’envisage la taxidermie à la fois en tant que moyen et sujet de la représentation. D’une part, elle me connecte avec le vivant: la compréhension du corps, d’un point de vue anatomique, renforce mon empathie et mon admiration pour lui, me permet de l’appréhender dans sa complexité, son poids, sa densité, peut-être même de l’habiter, de l’incarner. Par le biais de la taxidermie, je m’approche au plus près du vivant et le transforme en un objet saisissable: un objet du vivant. L’animal-objet acquiert sa propre voix, il devient le mémorial de sa propre histoire. D’autre part, les étapes du processus de naturalisation deviennent les sujets de diverses représentations en céramique, peinture, dessin, le tout prenant place dans des environnements foisonnants.

Parallèlement, j’envisage la taxidermie comme un moyen d’infiltrer le monde de la science. Comment, autour d’un même médium, se confrontent une démarche artistique et une approche scientifique ? L’intention étant de mettre de l’avant ces objets naturalisés et les histoires qui les habitent, tout en réactualisant la pratique de la taxidermie elle-même.» – Mathilde Demoli

 

Danielle Cormier

«J’ai déjà voulu mouler rien.

Je cherche à ressentir l’objet comme un espace, un espace qui est.

La matière avec laquelle je travaille est liquide, mouvante jusqu’à ce qu’elle s’arrête, se fige. Je tente de créer des objets qui sont en phase avec cette matière qui les constitue, avec ce qu’ils sont. Des objets conséquents, où se rencontrent nécessité et contingence. J’aspire à ce qu’ils portent en eux une trace de cette potentialité qui appartient à la matière liquide.

Je m’intéresse à une qualité qu’ont parfois les choses que je nomme autreté. Qualité qui lie d’un même trait l’être et le possible, qui imbrique à même la trame de ce qui est, ce qui pourrait ou aurait pu être. Avec elle, l’objet devient le lieu de ce qui aurait pu exister, il crée un espace pour l’autre à même le mouvement de sa propre définition. En se concrétisant, il se referme et s’ouvre d’un même trait.» – Danielle Cormier

  • Années d’études: 2021-2023
  • Directeur de recherche: David Naylor

 

Gabrielle Auclair

«Tirages argentiques et poésie sont couchés sur fibres de papier dans un désordre organisé tentant d’ouvrir un espace entre artiste et public où l’inscription est possible. Une tension entre le passé et le présent par les empreintes en paysage souligne un futur potentiel grâce à l’introduction de la nostalgie de l’artiste. Cette dernière est partagée par la présence du vide qui se présente de diverses manières au fil des pages: trace de pas dans la neige, écriture fragmentée, inclusions en papier, bref, présence d’une absence ressentie. Le retour sur ces instants révolus est fait en sachant très bien que leur finalité est inévitable, mais pourtant délectable.» – Gabrielle Auclair

 

Roxy Russell

Inépuisable, 2019, morceaux d’écorce de bouleau et fil métallique, 45×300 cm

«Mon champ de recherche est centré sur la perception du temps, de l’éphémère et la cohabitation entre le naturel et le culturel. En utilisant des végétaux que je cueille localement et en m’inspirant des paysages régionaux, mes œuvres reflètent mon passage à travers l’environnement dans lequel je me trouve. Bien que j’ai pu explorer avec plusieurs médiums, j’utilise principalement du fil pour coudre, crocheter et tisser.

Que ce soit par la trace de mes pas sur une ficelle, une plante qui flétrit dans un tissage ou un paysage brodé, des éléments éphémères sont mis en avant et suggèrent une tension entre la fragilité des composants et la dureté des processus. Les méthodes utilisées demandent une répétition systématique du même mouvement, ce qui insinue une certaine endurance et procure des irrégularités tout comme l’imprédictibilité de la vie. Actuellement, mes travaux se présentent le plus souvent sous forme de rouleau, ce qui accentue la sensation de continuité temporelle.» – Roxy Russell

 

Philip Gagnon

«Ma recherche artistique s’articule par une expérimentation conceptuelle, contextuelle et interdisciplinaire autour des limites dans le milieu de l’art. J’ai un penchant pour les médiums qui ne sont pas perçus d’emblée comme artistiques. Une médiation difficile à voir, la vente d’œuvres qui ne sont pas miennes, des courriels demandant l’impossible et des contrats aux articles absurdes en sont quelques exemples. Malgré tout, je peux user de médiums plus répandus, dépendamment des contextes de production et de présentation. Il m’arrive souvent de toucher au droit et à l’économie, ainsi qu’à d’autres disciplines extérieures à l’art. Je tends vers l’interdisciplinarité, car cela titille les précieuses disciplines du milieu. Puisque les esthétiques découlent des contextes, elles sont pour moi de simples outils faisant référence à l’histoire. L’esthétique « conceptuelle » est assurément celle que je préfère.

J’adopte une posture proche de celle du trickster afin de développer ce que j’appelle la «taquinerie institutionnelle». Au travers de la taquinerie, je désire révéler les paradoxes, les contradictions et les malaises reliés aux conventions du milieu, générer des réflexions critiques et créer des espaces de partage.» – Philip Gagnon

 

Pauline Gransac

Sphénoïde en trois morceaux (numéro 3) Graphite sur papier, 19×19 cm, 2019

«Je m’intéresse aux comportements du vivant, et plus particulièrement aux regroupements d’individus, aux instincts de survie et aux phénomènes d’intelligence collective, surtout chez les insectes et les oiseaux. Mes recherches, qui s’expriment principalement par le dessin, tentent de mettre en lumière les relations entre des phénomènes de regroupements d’individus dans un but de survie, et la disparition identitaire qui en résulte.

Je travaille donc sur l’idée de masse et de multitude, de l’individu et de sa disparition par sa multiplicité. Je questionne également le rapport que j’entretiens avec le dessin: dans un va-et-vient constant entre abstraction et figuration, j’explore cette ambivalence en poussant le dessin naturaliste de plus en plus loin dans le détail, jusqu’à en oublier ce que je suis en train de dessiner.

La représentation de l’oiseau et le principe d’accumulation sont deux éléments inhérents à mon travail. Dans un processus lent et presque méditatif, j’assemble des éléments du réel en manipulant leur échelle et en les multipliant jusqu’à les dénaturer. Décontextualisés, oiseaux et insectes deviennent alors un amas de plumes, d’écailles et de pétales à mi-chemin entre le vivant, le minéral et le végétal.» – Pauline Gransac

 

Lucie Gagnon

La nappe blanche

«D’œuvre en œuvre, ma démarche artistique est axée sur la capture de l’intensité, de la densité et la diversité des images issues de mon imaginaire et sur leur mise en évidence. J’applique à ma manière de peindre l’étiquette de multilemma, un terme anglais qui rend compte de situations où on est en face de plusieurs choix, contrairement au dilemme où il n’y en a que deux. Le foisonnement initial qui assure cette abondance est issu d’un processus typiquement surréaliste de superposition aléatoire de taches de couleur duquel affleurent des esquisses à demi complètes de silhouettes animales et humaines.

Mon travail de maîtrise consiste à explorer l’ensemble des possibilités de mise en évidence de ces silhouettes de manière à illustrer avec le plus de force possible l’énergie et le foisonnement de la vie. Je veux en arriver à mettre en scène de manière sensible et exigeante un monde fantastique où toutes les créatures s’interpellent dans un ballet échevelé et extravagant, où figures et espaces se confrontent et se confondent, et où des mondes étranges et merveilleux invitent à la rêverie et à la contemplation.» – Lucie Gagnon

 

Laurence Gravel

Laurence Gravel, L’opérette en deux actes,
vidéo performance 1024×768 pixels, environ 24 minutes, 2019-2020.
Capture d’écran

«La recherche artistique de Laurence Gravel s’articule actuellement sur le concept de beauté par l’entremise d’une société d’élite. Celle-ci est construite à la fois comme un hommage et une parodie, elle fait référence à des époques historiques qui la fascinent. L’hommage se manifeste par l’idéalisation de ces époques par le romantisme qu’elle lui transmet. Cette approche volontairement ambiguë l’a mené à pratiquer la performance et le jeu d’interprétation. C’est par ce jeu, souvent inégal et maladroit, qu’elle utilise la parodie comme fil conducteur à ses actions. Les différents protagonistes autant masculins que féminins, sont interprétés par l’artiste. Ceux-ci se développent à travers plusieurs mediums, soit la vidéo, l’installation et le collage numérique. Déguisés et maquillés à l’envie, ils font échos à la mise en scène du quotidien, en plus de critiquer la notion de binarité. Afin de renforcer l’idée de conformisme et de simulacre, ceux-ci sont inspirés d’œuvres cinématographiques plus ou moins connues. Dans leurs finalités, ils participent à créer des univers narratifs décousus mêlant le mélodrame à la comédie.» – Laurence Gravel

 

Kevin Kaname Favère

«Mon travail de création est un processus interrogeant la liberté de l’être humain à travers la métamorphose, l’hybridité et la mémoire. Il fait le lien entre nature et culture par un cycle de mise en abîme, plastiquement et conceptuellement. Le dessin est le principal médium de ma recherche plastique qui peut toutefois s’exprimer par d’autres médias et techniques mixtes. Mon intérêt pour l’hybride et la métamorphose montre souvent un fini proche du biomorphe, du chimérique, soulignant le lien entre la forme et la nature par des mécanismes comme la paréidolie. Mon travail stimule la perception du regardeur pour aller vers un enchaînement fractal de découvertes de formes et figures dans la contemplation, lui permettant de créer sa fiction.

Les travaux de Fred Deux, Francis Bacon, Jérôme Zonder, Gaëlle Chotard ou encore de Roman Opalka font partie de mes influences plastiques. Conceptuellement, il s’agit de Gilles Barbier, des écrits de Hermann Hesse, Friedrich Nietzsche ou encore d’Oscar Wilde. Ma réflexion lie rhizomatiquement beaucoup d’éléments plastiques et conceptuels de discipline dont les liens ne sont pas instantanément évidents, tout comme mes dessins paréidoliques, entre abstraction et figuration, agglomèrent des fragments issus des strates de ma mémoire pour les lier à celle du regardeur.» – Kevin Kaname Favère

 

Jérôme Trudelle

«Dans une pratique à mi-chemin entre la sculpture et l’installation, Jérôme Trudelle s’interroge sur la notion de dynamisme immobile découlant de notre capacité à percevoir et à reconstituer le mouvement dans un contexte d’immobilité. Par des stratégies de mise en espace, il manipule des objets et les met en relation dans le but de créer des espaces temporalisés, voire des événements sculpturaux. En exploitant des jeux d’intervalle, de vitesse fictive et de transition chronologique, l’artiste fait ressortir le potentiel narratif des objets pour raconter des déroulements d’actions construits de toute pièce et imaginés selon sa vision éclatée du mouvement. Avant de penser en termes de matériaux, de couleurs ou bien de formes, il pense en termes de déversements d’énergie, de trajectoires, de propulsions. De ses sculptures ressort ainsi un désir de faire durer l’espace. 

Cette approche réflexive est interreliée à une technique d’accrochage lui permettant de sculpter directement dans l’espace et d’exploiter les qualités esthétiques du fil de coton qu’il utilise pour la suspension des objets. Jérôme voit dans cette technique un potentiel à réénergiser la matière ; les objets suspendus s’animent, se dynamisent, se dissocient de tout caractère inerte qu’ils pourraient exsuder s’ils étaient placés au sol ou sur un socle. Ces morceaux de plâtre, ces objets du quotidien, ces retailles que l’artiste utilise dans ses œuvres dégagent un potentiel transformatif, une toute nouvelle présence, passant de passifs à actifs, de fixes à mobiles. L’objet est pour lui un véhicule d’énergie qu’il peut apprivoiser pour répondre à une vision dynamique précise.​» – Jérôme Trudelle

 

Isabelle Falardeau

«Ma recherche porte sur la spatialisation de l’image et s’articule actuellement autour d’un questionnement sur le brouillage entre les notions de lieu et de non-lieu, de terrain-vague, de chantier et d’infrastructure. Je construis des modules faits de bois de charpente et contreplaqué et j’y explore instinctivement le rapport que le corps entretient avec le matériau et l’image. Je joue sur l’ambiguïté de leur présence et sur les limites de l’accès, partiel ou entier, à celle-ci. Ma pratique de la photographie et celle de la sculpture parlent l’une de l’autre. Dans un cadre installatif, elles évoquent le geste, le temps écoulé pour l’exposition en prise de vue, la surexposition, l’effacement, le temps pour construire, fabriquer, échafauder…

Je me penche sur la notion de paysage-matériau, avec laquelle je questionne le paradoxe du fragment, à la fois caractéristique de la rupture et de la complétude. Je m’intéresse aux territoires de mémoire, ceux avec lesquels je recompose des paysages brouillés subjectifs s’apparentant à des bribes de souvenirs. J’explore ainsi présentement la zone suburbaine où j’habite parce que je l’ai vue se transformer, se bâtir et s’effacer en alternance avec les années. En résulte une perception de la réalité comportant de multiples couches, à la fois distinctes et amalgamées, participant à la réflexion que je développe à l’intérieur de mon travail à la maîtrise.» – Isabelle Falardeau

 

Fanny H-Levy

Ces lignes qui t’ont fait, 2019
Impression, encre et grattage sur papier
Photo : Débora Flor

«Ma recherche est habitée par la tension qui s’exerce entre la présence et l’absence, l’apparition et la disparition, le dedans et le dehors des figures. Ma pratique du dessin, volontairement rudimentaire et austère, sonde ces phénomènes sous différentes formes d’actions performatives. Elles ont lieu à l’atelier ou in situ dans différents lieux. La pratique se déploie par des actions de dessins, d’installations, de cocréations dans la communauté, et dans l’espace public par des dispositifs de dessin participatif. Dessiner est dans ma pratique une action non seulement artistique, mais aussi politique et sociale de résistance à l’effacement et à la disparition.

C’est par ces actions que je m’intéresse à la figure comme espace en friche à parcourir. La figure devient un territoire qui se re-trace, tentant de faire émerger les parcours fantomatiques du passé et les lignes d’un présent en devenir.» – Fanny H-Levy

 

 

Étienne G. Rousseau

Abstraction V, acrylique sur toile, 121,92 x 101,60 cm, 2020

«Ma pratique en art se conçoit uniquement en peinture orientée vers l’abstraction où je travaille la forme et la couleur exclusivement liées à mes états émotionnels. Ma préoccupation première tourne autour du principe de l’équilibre pictural qui consiste à répartir les éléments visuels dans un tableau de manière à harmoniser la composition et les proportions. Afin d’arriver à ce stade, mes peintures sont balancées selon leurs composantes picturales nécessitant ainsi une préoccupation constante du poids visuel de celle-ci. Ce terme s’établit en termes de pesanteur (légèreté-lourdeur) auprès des formes, des couleurs et des espaces (allégé-surchargé).

L’aspect de dualités entre deux notions plastiques (transparence-opacité, chaud-froid, clair-obscur, traits-masses, minceur-épaisseur, aplat-modelé, formes circulaires-géométrique) est aussi présent dans mon travail afin de créer ce que j’appelle des tensions spatiales. Ces rapports de dualité complètent, avec l’équilibre, le dynamisme visuel qui se construit devant nos yeux.

Composées d’un amas de masses de couleurs de différentes grosseurs et de formes aléatoires, mes peintures sont créées en majorité par des traces de vitesse. Travailler avec la peinture acrylique est un avantage puisqu’elle sèche très vite et qu’elle me permet de venir camoufler, juxtaposer, altérer ou foncer une ancienne couleur sans qu’elles se mélangent. La conception de mes toiles est un processus d’accumulation et de superposition de masses colorées qui se conçoit rapidement et instinctivement, dans l’esprit postmoderne qui suppose que l’œuvre s’édifie sans plan préétabli, selon ses propres avancées.» – Étienne G. Rousseau

Voir la vidéo de son exposition de fin d’études

 

Érika LeBrun

«L’intention liminaire de mon enquête est de questionner la nature même de l’activité artistique du point de vue de la poïétique. Concernée par une réflexion philosophique sur les questions existentielles, expérientielles et phénoménales intrinsèques au travail créateur, ma recherche s’intéresse à saisir concrètement et conceptuellement la relation de l’être au devenir à travers les processus dynamiques du faire inhérents à ma démarche transdisciplinaire en arts visuels. J’examinerai ainsi mon univers artistique afin d’y tracer une cosmologie ; elle est l’approche qui m’apparait la plus juste en vue d’étudier le grand contexte dans lequel ma pratique évolue. C’est donc à travers une phénoménologie cosmologique que je me propose d’explorer mon activité artistique afin d’y pénétrer le noyau actif; il est le principe générateur duquel émerge mon travail; il est la cristallisation de la matérialité de l’expérience temporelle issue de la performativité du geste créateur. Mon étude s’ancre ainsi sur une réflexion métaphysique de l’œuvrer à travers ma posture de chercheure qui se laisse conquérir par l’abstrus, le paradoxe et l’indicible. C’est donc avec la plus grande humilité qui sera ici tentée une esquisse de mon aventure d’artiste, en offrant un témoignage singulier de celle-ci. Les motivations profondes qui engendrent cette entreprise siègent parmi un désir abyssal de joindre mes observations, telle une goutte d’eau dans l’océan éternel du savoir. Mon expérience ainsi recensée, elle s’inscrira parmi une multitude d’écrits d’artistes-chercheurs qui ont tenté, dans un élan contingent au mien, de faire la lumière sur l’activité anthropologique sui generis que constitue la pratique des arts.» – Érika LeBrun

 

Andrée-Anne Laberge

Le foyer, 50x60cm, Graphite et encre sur papier yupo, 2020

«Andrée-Anne Laberge établit un parallèle entre le traumatisme vécu sur le plan individuel et celui subi par notre environnement. Elle s’intéresse tout particulièrement au syndrome de choc post-traumatique et de son impact sur les fonctions neurologiques. La maison devient le symbole central pour mettre en image le traumatisme. Celui-ci survient lorsque certaines limites ne sont pas respectées et que l’on détruit ou abuse des ressources du territoire d’autrui. La frontière étant inhérente au concept de territoire, l’artiste s’intéresse à celles qui délimitent l’intérieur de l’extérieur. Son travail se présente sous forme de multiples dessins superposés et de sculptures de format miniature où la suspension dépeint la perception du temps modifiée propre à la catastrophe.» – Andrée-Anne Laberge

  • Années d’études: 2019-2021
  • Directeur de recherche: Jocelyn Robert

 

Alexanne Dunn

«Ma démarche artistique se concentre présentement sur les territoires miniers de ma ville natale, Thetford Mines. La fermeture de l’industrie minière a exposé la population à des enjeux économiques, politiques, sociaux et environnementaux. Je porte un fort sentiment d’appartenance envers les paysages industriels de ma région; ce décor que je considère tout aussi grandiose que familier est profondément ancré dans mes souvenirs d’enfance. Je tente ainsi de dévoiler la complexité des relations que nous entretenons avec le paysage; une recherche qui ne se veut ni revendicatrice, ni critique, mais profondément sensible. Bien que les paysages confectionnés soient issus du réel, ils sont à mi-chemin entre figuration et abstraction, où les couleurs pastel déguisent les gris de la mine.» – Alexanne Dunn